MFDS 2016 – Récit de convention
Si les feuilles desséchées commencent à joncher les rues, ce n’est pas causé par un automne précoce mais bien par une chaleur accablante. Températures au plus haut cette semaine dans le quartier joliment nommé « Nino Jesus ». A l’est de Madrid, au-delà du parc Retiro, le quartier est résidentiel et très calme. L’hôtel est composé de deux hautes barres dénommées Europa et America. A l’accueil, de charmantes et jeunes personnes vous prennent en charge, mais comme toujours en Espagne – et aussi en France – tout ce qui est touristique est fâché avec l’anglais – et moi avec l’Espagnol depuis que j’ai choisi le latin en seconde langue.
L’avion ayant touché sol vers 21h, j’ai tout juste le temps de me restaurer d’une large bière et d’une tartine d’anchois avant d’aller me coucher – oui je sais c’est un peu violent.
Le lendemain, comme toujours en vacances, mon emploi du temps est chargé. Même si j’ai l’équivalent énergétique d’un mollusque, je me dis qu’avec beaucoup de volonté je vais affronter le métro surchauffé mais propre et ne sentant pas la pisse comme à Paris. S’agissant de mon 4ème séjour à Madrid et ayant visité les plus grands monuments, je me dirige vers les musées dits secondaires.
Je commence par le Musée des Arts Décoratifs, un peu oublié dans ce vaste quartier des musées . Une bâtisse discrète sur 3 étages renfermant des tissus anciens, des meubles marquetés, des objets religieux et des représentations d’intérieurs meublés, tout ceci sans aucune climatisation. Je crains pour les bois précieux. Personne ne parle anglais et mettre mon chapeau à la consigne est une mission digne d’un agent secret.
Je suis toujours touchée de voir la renommée de la France à travers une tasse de Sèvres qui a résisté toutes les époques et les déconvenues de l’Histoire. Quel rayonnement culturel, peut-on en dire autant maintenant, j’en doute… L’exposition du moment réuni les œuvres artistiques d’un créateur de bijoux dans une scénographie magique ; des globes de verres comme des ampoules surdimensionnées renferment des créations étonnantes, des colliers délicats, des bagues carrées. Une belle surprise.
J’arrive quand même à tourner deux heures dans un musée réduit, à tarif super attrayant de 3 euros. Direction le Musée Archéologique de Madrid. Situé non loin du Prado, dans un grand bâtiment classique sont présentées de superbes collections allant du paléolithique à la Renaissance. Une scénographie moderne et séduisante sur 3 étages. Je vibre toujours devant les vestiges romains, une véritable passion – remember mes cours de latin ; l’égyptologie avec une belle collection de sarcophages, le moyen-âge outrageusement représenté à grands renforts de statues en bois polychromes, de soubassement d’églises et d’objet de cultes ornés de pierres précieuses. Je suis littéralement surexcitée à la vue de la période de la Grèce Antique et les centaines de vases noirs et ocres. Ce style de poterie est mon premier souvenir d’Art. Déjà, à 5 ans, j’exerçais ma rétine à la beauté du monde. Mes parents nous trimballaient de musées en musées. J’ai un souvenir vif et précis du musée d’Athènes, ces silhouettes aux muscles affinés et chevelures bouclées me passionnaient. Plus tard, je tombais en transe, à 8 ans devant des Bruegel à Vienne et vous savez tous que je souffre du syndrome de Stendhal devant un Rembrandt.
Comment vous dire ? Mes pieds n’étaient pas loin de ressembler à l’amas de miettes d’os vues dans les vitrine du paléolithique. Me rappelant que je suis en convalescence, j’ai préféré retourner à l’hôtel vers les 18h et faire ce que mon père nous enseignait à chaque voyage. En bon militaire, il est obligatoire de faire une bonne reconnaissance en vue de se ravitailler et de jauger l’ennemi. Donc j’ai pris l’habitude de sillonner à pied le quartier dans lequel je me trouve en marchant en « carré » ou en faisant le tour histoire de ne pas se perdre – et en plus je n’ai pas de plan et un smartphone qui ne supporte pas la chaleur donc d’aucune aide.
Dans ce quartier du « Petit Jésus », il a une profusion de pharmacies, au moins 5 à moins de 200 m l’une de l’autre, étrange… Les miracles de jadis passent-ils mieux avec de petites pilules de nos jours ? Je passe par le pont enjambant une large autoroute, autant vous dire que si vous respirez par la bouche, ça pique les gencives. Et j’arrive devant un grand centre commercial « Alcampo » traduction magnifique de « Auchan ». J’adore les supermarchés à l’étranger parce qu’on y observe une faune forcément naturelle et on y trouve des curiosités culinaires. En cette fin de soirée, c’est la cohue devant les fournitures scolaires, je vois des cahiers voler. Je trouve les rayons immenses, larges, très hauts et très richement achalandés. Les fruits sont deux fois plus gros et deux fois moins chers. Les gâteaux sont grossis à la loupe, les donuts de toutes les couleurs et de tous les glaçages possibles écœurent mon œil. Je me replie sur un jambon et saucissons locaux, du pain et du vin car je n’ai plus le courage de bouger pour une sortie nocturne. J’ai même peur de ne pas être en forme pour affronter la folie Barbie.
Après un bain délicieusement moussant au parfum de Daïquiri et le fond de la bouteille de vin, je me rends à l’évidence, je ne suis plus assez alerte pour entreprendre les 3 niveaux d’escalator de la station du métro près de l’hôtel. Un bon gros dodo (et sûrement de bonnes crampes) et demain je serai comme neuve pour l’aventure.
Toute convention commence par l’enregistrement où l’on vous remet un,sac contenant la ration du survie du conventioneur : l’accréditation, des goodies offerts par des sponsors, des flyers annonçant les prochaines conventions. Il fut un temps où Mattel était très généreux question goodies. A cet époque, la collection était une vitrine qui servait à vendre la playline. Rien de tout cela maintenant, les annonceurs privés ont remplacé les « corporate ». Ce moment purement administratif est l’occasion de retrouver ses amis après de longs mois de séparation ou d’observer ce jeu de rôles qui envahit peu à peu le monde de la collection.
Imaginez Versailles, le Roi Soleil arrivant la tête haute, une cohorte de courtisans se pressant frénétiquement à ses pieds. Un regard et vous voilà adoubé. Il y a les besogneux, les manants, les petites mains, ceux de l’ombre qui voient passer cette cour empesée en se demandent bien pourquoi ils se sont retrouvés dans cette galère. C’est à qui fera sa révérence en premier. J’ose espérer pour eux qu’ils pensent comme moi que cela n’est qu’un jeu de rôles mais je n’en suis pas si sûre. C’est un spectacle qui me donne toujours un petit haut le cœur. Avec ce qu’il me reste de naïveté enfantine (un bon paquet), j’aime croire que nous sommes là pour l’amusement et l’insouciance, quitter un instant nos quotidiens lourds déjà encombrés de jalousie et de bêtise.
La star de la convention est Carlyle Nuera, designer chez Mattel Usa, créateur des lignes Fashionistas, de la Mutya et Claudette Gordon.
Il a une physionomie sympathique et justement on sent poindre chez lui un émerveillement resté de l’enfance. Il est très abordable comme la plupart des américains. Il est ici pour expliquer son travail et dédicacer vos poupées. C’est le service à l’américaine.
Il est difficile de retrouver ses amis quand tous habitent aux quatre coins de l’Europe. Il est encore plus difficile de faire coïncider les horaires d’enregistrement avec les horaires d’avion. J’adorerais m’enregistrer par internet et trouver mon paquet sur mon lit dans ma chambre d’hôtel pour gagner du temps car à nouvelle ville, nouvelles activités et emploi du temps chargé.
Je décide donc de visiter le Musée Lazaro Galdiano. Une demeure de collectionneur d’art. La disposition est restée la même, les hauts plafonds peints dans un style pompier témoignent d’une grande largesse de moyens. La fortune a été faite dans l’édition et a permis d’entasser nombres d’objets allant de la pièce de monnaie romaine au tableau de Goya.
Ce qui frappe lors de cette visite, hors la diversité des thèmes de collection, c’est un côté masculin très prononcé. D’abord à travers les toiles collectionnées, beaucoup de peintures religieuses (il y a quelques magnifiques El Greco), des portraits d’hommes d’états, des scènes cauchemardesques de Goya (mes préférées). Monsieur était un intellectuel. Point de Poussin et de fessier joufflu ou de portrait de courtisanes. Les rares personnages féminins sont de dodues matrones à la Ingres ressemblant étrangement à son épouse ou des portraits d’enfants. Il y a de surprenantes armes de collection, des pièces de monnaie antique. Mon cœur bat la chamade à la vue d’une pièce datant de l’époque de Auguste ou César, des bronzes, des montres à gousset, les bijoux de Madame de chez Cartier. Dans chaque pièce parcourue, il y des photos d’époque de la demeure (vers 1910) avec une multitude de choses accrochées au mur, à touche-touche. Un véritable musée. Je me pose la question de comment mâcher sa tartine de pain beurré devant un Goya par exemple. Est-ce qu’on passe tous les jours devant à scruter le moindre détail ou au contraire, à la longue, cela ne fait pas plus d’effet qu’un calendrier de La Poste.
Par une chaleur de plomb dans un métro surchauffé, il faut revenir à l’hôtel pour le cocktail du soir, la Jaïpur Party. La salle est décorée de pans de tulle jaune et rose. Un tapis rouge laisse présagé un défilé de mode. En effet, des collectionneurs passionnés ont revêtu des costumes fait-main de leur Barbie préférée. Certains trichent un peu, ils ont transformé leur Barbie à leur propre effigie. Au contraire des conventions américaines où d’enjouées mères de famille, totalement désinhibées rient souvent d’elles-mêmes dans des costumes rigolos, en Europe, seule une grande majorité de gays osent le travestissement. Au final, et cette opinion n’engage que moi, on ne sait plus s’il faut rire ou pleurer. Nous avons des petits tickets à donner à nos costumé(e)s préféré(e)s, je choisis bien évidemment Scarlett O’Hara dans sa robe rideau pour madame et un pilote de ligne pour monsieur. C’est un compromis qui l’emporte, un conventioneur grimé en Barbie Chiffon Ball Gown avec déhanché de catwalk et regard provocateur en direction de Carlyle Nuera, designer de cette même poupée. Ça sent un peu la lèche tout ça…
Viennent les consommations et des amuse-bouches de houmous, beignets d’aubergine, samosas, poulet tikka et pâtisseries indiennes à base de ghee. J’ai du mélanger je ne sais combien d’alcool car il fait chaud et il faut socialiser pour le travail. Il n’y a pas que l’amusement, tout ce monde de la collection est un jeu de miroirs déformants.
Mes amis et moi n’avons pas le cœur à aller nous coucher aussi nous optons pour un dernier verre en ville au point central de la Puerta del Sol, surpeuplée à minuit. Une foule jeune se masse devant des acrobates de rue. Les tenues des jeunes filles sont très courtes, le maquillage se veut appuyé, les lèvres foncées et le pli de la fesse visible. En journée, le spectacle est le même, ce n’est que jambes nues et short court. Tout ceci semble très loin de nos embourbements de burkini. Même si une immense bannière trône à la Plaza de Espana affichant un énorme « Welcome Refugees », ils sont bien cachés ou exilés et ne semblent pas troubler la vie madrilène.
Nous nous restaurons de choses légères et équilibrées comme des hamburgers et un sandwich aux calamars vantés par des connaissances locales. Avec un demi litre de bière, ça passe bien ! Il est trop tard pour rentrer en métro, tout est fermé. Un taxi nous ramène dans une ville encore bien active à 3h du matin.
Le réveil est matinal car la journée va être longue. Je dois attendre la nouvelle distribution d’accréditations pour mes amies rennaises retardées à l’aéroport. Je veux pourtant encore visiter un musée. Je suis en manque de peintures comme une droguée en manque de poudre. Contempler un tableau est comme la promesse d’un monde meilleur. Chaque madone de la Renaissance est une prière, chaque joue rosie du XVIIIe une caresse, chaque trace de pinceau une respiration. Je vis pour cela. Je n’ai pas encore vu Les Offices de Florence, ce qui reste réalisable ainsi que Berlin mais mon grand rêve demeure St Petersbourg. C’est bien simple, à chaque ville visitée, il y a un passage obligé dans un musée de peintures. Vous de la gente masculine qui aimez les musées (ils sont rares), présentez-vous et je vous épouse tout de suite.
Je suis de mauvaise humeur car j’arrive pourtant à l’ouverture du musée Thyssen et il y a déjà une queue monstre. Visiter les musées un samedi est une hérésie d’autant plus que que ce sont les derniers jours d’une exposition temporaire consacrée au Caravage. Je cours vers le Prado, idem, des files d’attente impossibles. Je me résigne à abandonner, je connais pourtant ces musées mais l’appel des toiles est une torture. Bredouille, je traîne les pieds et me prépare pour le cocktail consacré à Sebastian Atelier. Encore une fois, rien est signalé, je sillonne les couloirs et tombe sur des âmes errantes dont une américaine absolument énervée par la situation. Et on descend et remonte des escaliers pour se retrouver à une vingtaine de personnes à attendre l’artiste comme des groupies devant une loge.
La porte s’ouvre et les modèles nous attendent en exposition. Tout le monde sort son smartphone et appareil photo pour saisir au mieux les détails de broderie. L’assistance est composée de clients fidèles, de fans et de blogueurs. J’aurais l’occasion de reparler de cette « profession » si particulière dans le monde de la poupée. Carlyle Nuera et sa suite nous font l’honneur de leur présence. Le créateur de ces modèles ooak (one of a kind) se voit donc prié de faire un petit discours pour expliquer son travail. Tout en anglais. Ce n’est pas facile de s’exprimer dans une autre langue que la sienne qui plus est devant un créateur de chez Mattel. Sébastien nous apprend qu’il a cousu près de 10000 sequins pour cette collection de 8 poupées. L’assistance reste béate, je ne crois pas qu’ils réalisent ce que ça représente. Les gens veulent aussi savoir si c’est cousu sur la poupée, si on peut enlever le vêtement. Le numérique est passé par là avec cette tentation de tout rhabiller – j’en connais un rayon – or une poupée ooak est une vision d’artiste dans son intégralité. Je n’ai même pas le temps de grignoter, je discute avec les convives. Carlyle Nuera vient s’asseoir à côté de moi et j’en profite pour lui poser quelques questions sur son travail puisqu’il a créé le look des Fashionistas. C’est amusant d’apprendre que ces looks sont stratégiquement pensés d’une façon purement commerciale. Des équipes chez Mattel partent à la pêche aux tendances dans les magazines, les people, la rue pour déterminer ce dont on parle le plus comme les cheveux roses par exemple ou les emoji. De toute cette réflexion naît une essence marketing que l’on retrouve sur Barbie. Vous allez voir que bientôt ils vont nous inventer un algorithme pour créer une Barbie. La fibre artistique perd du terrain et amènera un prémâchage commercial.
C . Nuera me confirme ce que Mattel France m’a appris, à savoir une collection de vêtements Fashionistas et la continuité de la collection puisqu’il bosse sur les Fashionistas 2018. Aura t-il l’inspiration des cheveux gris-lavande car à trois reprises il m’a dit adorer ma couleur.
Il est 15 heures et je tente d’acheter un billet en ligne pour Thyssen, sans succès, tout est inaccessible. De rage et frustration, je décide de visiter le musée du costume. Ce n’est pas une mince affaire car il faut faire une sacrée marche à la sortie du métro à l’autre bout de la ville. Tout ça en pleine chaleur. Le musée est en préparation de la fashion week qui démarre lundi. Il faut encore gravir des séries de marche en plein soleil. L’entrée est gratuite ! Tiens donc ! Et pour cause, au bout de la première vitrine, les portes sont fermées. Retour à l’accueil, explications avec la fille de l’accueil qui parle 4 mots d’anglais. En gros, les 3/4 du musées sont fermés pour cause de travaux. Genre c’est pas une info à annoncer sur votre site internet des fois ? Il y a une mini expo sur des jouets et une aile de musée avec des créateurs espagnols dont je n’ai jamais entendu parler.
L’aide Balenciaga est fermée. Il me faut presque une heure de métro pour rejoindre le centre est me résigner à visiter le musée de Madrid. Grosse bâtisse rose en plein cœur de la ville qui relate l’évolution de la ville à travers les époques. Et là rebelote, certains étages sont fermés. Mais il y a suffisamment à voir : des tableaux relatant les grands monuments, des gravures, des plans, des objets usuels mais tout s’arrête vers 1830. Je traîne des pieds pour rentrer à l’hôtel, je suis frustrée.
Comme toujours, je suis super en retard pour me préparer pour la grande soirée de Gala. Le maquillage est en mode accéléré, la coiffure est inexistante et la tenue pas franchement originale, la valise cabine ne permettant pas d’extravagance vestimentaire. J’ai laissé tomber l’idée du sari car ma frange, mon teint d’endive et mes cheveux gris ne font franchement pas couleur locale indienne. Je cours dans les couloirs et là comme par miracle il est 20h30 et aucun retard annoncé, j’ai même loupé l’apéro ! Un comble !
La salle baigne dans une ambiance de discothèque, du bleu, du violet du rose. Notre table de français est la plus loin de la scène possible. La directrice de la convention prend la parole pour un petit speech en espagnol et en anglais ce qui est bienvenu pour les étrangers, il y a quand même des australiens, des suisses, des anglais, des néerlandais. Un peu plus de 140 personnes je pense.
Sébastien est l’hôte de table et nous nous distribuons nos petits cadeaux de table. Encore une fois, la valise cabine limite les possibilités. Ce n’est qu’au retour que l’on a le temps d’apprécier les présents. Des vidéos annonçant les prochaines conventions sont présentées : la convention de Rome en novembre sur le thème de la mode, celle du Portugal sur les espions, celle de Milan l’année prochaine sur le mariage et celle des Etats-Unis en Juillet sur l’espace puisque ça se passe à Houston. Il faut s’enregistrer relativement tôt c’est le problème. Je n’arrive pas à me projeter si loin. Rome et Lisbonne sont déjà complets, le thème du mariage très peu pour moi, seule me tente les states mais Houston en juillet… hors de prix et trop chaud.
Un jeu consiste à effectuer quelques gestes de danse Bollywood table après table pour ensuite effectuer une chorégraphie générale. Ils ont eu la bonne idée de commencer à servir le vin blanc ce qui rend la chose plus facile. Au son du célèbre et entêtant « Chori Chori », nous voilà à nous agiter de façon désordonnée mais festive.
Puis viennent les tirages au sort, l’hôte de table sort un sac rempli de petites choses en nombre suffisant pour que chaque convive reparte avec un cadeau. De manière totalement inattendue car cela ne m’arrive jamais, je gagne le centre de table, une Barbie customisée avec un joli sari et un décor pliable. Ma voisine essaie bien de me soudoyer mais je suis déterminée, ce petit décor sera réutilisé dans mes photos.
Le repas commence à être servi, l’entrée est une salade composée avec morue salée et agrumes sur une vinaigrette acidulée et fruitée, un vrai délice. La scie « Chori Chori » retentira à de nombreuses reprises nous obligeant à nous lever et à gesticuler. Je vous laisse deviner l’état de la représentation après plusieurs verres de vin ! D’ailleurs nous en bons Français, nous descendons les verres à vitesse grand V et je vais piquer des fous rires d’anthologie, mon rire se transformant en hoquets suraigus faisant gondoler tout le monde. Mon maquillage coule, je tartine ma serviette de mascara. Il faut dire que notre ami Maurizio est en grande forme et ses mimiques et son accent italien me font mourir de rire.
Vient le plat principal, un poulet parfait, grillé et tendre, une sauce acidulée pas trop épicée et un riz basmati. Une danse de voile vient nous divertir ainsi qu’un couple de danseurs Bollywood d’une école de danse de Barcelone. Je suis déjà fan des films Bollywood, j’en regarde régulièrement en dvd ou en ligne, c’est une musique qui met systématiquement de bonne humeur. L’énergie des danseurs est électrisante, ça donne vraiment envie de s’y mettre. Je suis prête à tenter l’expérience, ça me changerait de la country.
Entre la poire et le fromage, la Barbie de convention est dévoilée. C’est le moment que tout le monde attend. Enfin moins qu’autrefois depuis que Mattel a décidé de faire les mêmes poupées de convention à quelques différences près dans la couleur des cheveux notamment. Celle-ci est la même que l’exclusivité milanaise, a les cheveux noirs et non bruns. Il y a un vague brouhaha d’admiration par respect pour le créateur américain qui se trouve dans la salle. La Barbie spéciale faite par des designers locaux et approuvée du sceau Mattel retiendra toute l’attention. Limitée à 100 ex c’est un trésor. La boite est magnifique, la poupée aussi même si je ne suis pas fan de l’association des couleurs.
Le dessert est un comme un lhassi en mousse, c’est à la fraise et c’est très délicat, j’adore, le tout accompagné d’un demi verre de mousseux. Le service était parfait, ni trop rapide comme aux Etats-Unis ni envahissant.
Un petit film nous annonce le thème de la convention l’année prochaine, un « Casino Cruise » sur fond de Sharon Stone dans le film de Scorcese. Réaction mitigée de la salle. Qu’est ce que cela peut donner en poupée ? Moi qui ne gagne jamais rien et pour qui 4 ou 5 voyages à Las Vegas ont du me rapporter 200$ en tout aux bandit manchot, je reste de marbre. J’irai donc à Rome l’année prochaine. Et s’en est fini des poupées de convention Silkstone, retour aux Model Muse l’année prochaine.
Les convives partent rapidement et quelques uns restent pour la discothèque. Le temps de remonter déposer les présents et ne pas mettre de chaussures plates (quelle idiote!) nous voilà sur la piste de danse. Il y a un très bon DJ qui a commencé avec du Grease, et les grands thèmes pop comme du Abba et du Bee Gees pour passer à du Madonna communauté gay oblige en passant par leur hymne « I will survive ». Mais tout passe avec quelques whisky-coca. Notre petit groupe de français est littéralement mort de rire et très en forme. Quand de la musique indienne retentit, Sébastien nous gratifie d’une chorégraphie improvisée digne d’un Bollywood, il a ça dans le sang et devrait sérieusement penser à s’y mettre.
Vers les 3 heures du matin, la musique stoppe à grand regret, j’aurais pu continuer ainsi jusqu’à l’aube. Le temps de discuter sur le trottoir, remonter à la chambre, écrire le blog, je n’ai que 2 heures de sommeil devant moi.
Au petit matin, il faut préparer la valise de retour, rien ne rentre… forcément. J’ai aussi eu la bonne idée d’acheter des livres !! La salle des ventes ouvre à 10h pour les conventioneurs, 11h pour le public . Les artistes sont en place, il y a quelques vendeurs, des vêtements et des collections personnelles, pas beaucoup de professionnels. Techniquement, il m’est impossible de déplacer de la marchandise jusqu’en Espagne à moins d’y aller en voiture, ce qui est beaucoup trop fatiguant et risqué pour une fille seule. Expédier par avion revient trop cher par rapport à la recette espérée car les salons ne sont plus ce qu’ils étaient. Les temps étant très difficiles, les dépenses sont modestes. Les américains, gros acheteurs ont déserté les conventions européennes par peur des attentats, les artistes ont plus de mal à vendre leur production. Les prix ont fortement augmenté, 1200 euros pour une poupée ! Qui peut encore se permettre ça ? Et je n’ai pas envie de financer un train de vie vip assumé de certains créateurs. J’ai un coup de cœur pour une Barbie en rose de chez Artist Creations mais le prix me rebute, j’ai un budget et ça le dépasse fortement. La Lady Gaga de Alla Dolgaleva Rapoport me plaît beaucoup mais je ne suis pas fan de la chanteuse donc je n’y vois pas d’intérêt. Je ne peux pas acheter de Barbies en boîte, je n’ai pas de place dans ma valise. Je me contenterai de vêtements de créateurs.
Je tente de me frayer une place devant le stand de Marcelo Jacob, créateur brésilien que j’adore de par son travail et sa personnalité généreuse et positive, en plus il est beau gosse ! J’apprécie sa coupe stylisée et précise. Je vais glaner quelques petites robes dans un style sixties, je sais comment je vais les photographier et sur quoi, à suivre….
Cette année, j’ai participé au concours photo. J’ai fait 4 séries différentes et n’arrivant pas à me décider, ai demandé à mes amis Alexandra, Maurizio et Sébastien de décider. De manière unanime, le choix s’est porté sur la Barbie bleue, une création d’Artist Creations achetée il y a quelques années.
Le tirage est de mauvais qualité, fait par les organisateurs sur une imprimante couleur. J’aurais préféré leur envoyer un tirage photo de qualité.
Il est temps de partir rejoindre l’aéroport pour le vol de retour. J’apprendrai dans la soirée que j’ai gagné le premier prix photo et une Barbie Look Urban Jungle.
Je quitte à regret mes amis, ce court séjour m’a fait un bien fou et m’a redonné un peu de cette énergie partie avec mon opération puis mon burn-out. La récupération est ultra lente et je dois changer de style de vie. Je prends conscience que j’ai vraiment eu la tête dans le guidon depuis très longtemps que rien ne comptait plus que le travail, les clients, les délais, les fournisseurs et que j’en avais oublié de vivre. Un vrai petit hamster dans sa roue. C’est une grosse remise en question personnelle. Je prendrai plus de temps pour moi l’année prochaine, plus d’évasion. Ne vous y trompez pas, j’ai toujours le même amour de mon métier, je fais juste un tri dans mes priorités. Moins de monde au sens figuré et plus au sens propre.